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Nan'de? ▬ なんで? • Miharu

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Lun 30 Juil - 2:24
Nan'de ? ▬ なんで ?Fiche Miharu Katame

Comment on en était arrivé là ? J’ai beau y penser et y repenser, je n’arrive toujours pas à comprendre. Elle avait accepté mes sentiments, mieux, elle éprouvait les mêmes, alors pourquoi ? J’aurais aimé lui demander, la retenir, mais une fois encore elle m’avait échappée.

On avait commencé à se voir, je sais pas si on pouvait dire qu’on sortait vraiment ensemble mais ça me plaisait de me dire que oui. On se voyait généralement à la fin des cours, il arrivait même qu’elle m’attendait à la sortie pour faire un bout de chemin ensemble avant qu’elle n’ose me prendre la main une fois le lycée loin. J’avais compris qu’elle n’était pas trop à l’aise et je ne faisais aucune remarque, je ne voulais pas la blesser pour rien. Elle m’avait fait part de ses inquiétudes concernant notre différence d’âge, et j’avais essayé de la rassurer du mieux que je le pouvais. Moi, je m’en foutais, quatre ans pour moi c’était rien, mais pour elle… Est-ce que c’est pour ça qu’elle est partie ? Parce que j’étais trop jeune pour elle ? Ou bien était-ce à cause de… Non ça ne pouvait pas être ça. Mais peut-être que…
Pour la première fois depuis des années, je me mettais à douter de moi, de mes yeux. J’avais vécu avec jusqu’à présent, je m’en était même très bien sorti sans jamais en être triste, j’avais découvert une autre face du monde en ne pouvant plus le voir mais en apprenant à le ressentir et surtout, j’étais tombé amoureux d’une belle jeune femme, aussi belle d’extérieur que de cœur. Mais elle était partie aujourd’hui… Plus j’y pensais, plus je me disais que c’était la faute de mes yeux, que si j’avais pu la voir, j’aurais compris que quelque chose n’allait pas. Mais non, j’avais été aveuglé par mon propre bonheur au point de ne pas voir qu’elle, je la rendais triste. Mes yeux, je les ai maudits pour ça, parce qu’ils refusaient d’aller mieux, parce qu’ils refusaient de la voir. J’en ai pleuré de rage, de ne pouvoir recouvrer la vue.

Je recommençais à aller régulièrement à l’hôpital dans l’espoir de l’y retrouver, mais ça recommençait, elle me fuyait, elle n’était pas. Ces yeux dont j’étais si fier, j’ai commencé à les masquer. Si avant mettre un bandeau était un jeu, aujourd’hui c’était devenu une nécessité, je ne voulais plus qu’on puisse voir ces deux orbes floues répugnantes. J’espérais vainement qu’en faisant ça, elle reviendrait, mais non. Pire, j’appris qu’elle avait quitté la ville, peut-être même le pays et tout ça, à cause de moi…
A partir de ce jour, j’arrêtais de sortir de chez moi. Je laissais tomber les cours, je me faisais livrer pour manger, je faisais venir une aide à domicile pour les tâches ménagères, j’en vins même à faire venir régulièrement une infirmière pour me soigner. Je me coupais en essuyant un couteau, je tombais en trébuchant sur le tapis et me foulais la cheville, je shootais dans le pied d’un meuble et me brisais un orteil, tout y passa et le pire, c’est que je ne faisais pas exprès. Tout ce que j’avais appris, disparu, envolé, j’étais comme au tout début de ma cécité : incapable de me débrouiller seul. Avec elle, j’avais perdu ma joie, ma combativité, il ne restait que ça, un aveugle incapable. En sortant les poubelles, je fis même une chute dans les escaliers, ce qui me conduisit directement à l’hôpital parce que ma tête avait sévèrement trinqué. Mais je n’avais toujours aucune nouvelle d’elle et je m’enfonçais de plus en plus dans le noir le plus profond.

Voyant l’argent de mon compte en banque filer à toute allure, ma mère finit par me téléphoner, inquiète. J’essayais de lui faire croire que tout allait bien, mais on ne peut rien cacher à celle qui vous a mis au monde. Comprenant mon état, elle me fit rapatrier d’autorité chez nous et je ne la contredis même pas. Pourquoi rester ici alors que celle que j’aimais en était partie ? Plus rien ne me retenait ici, il ne restait que les rêves illusoires d’un gamin écervelé.
Je rentrais chez  moi, non, chez mes parents, ce n’était plus chez moi depuis mon départ. Rien n’avait changé, ou du moins je le supposais, je ne savais plus. Mon père fut le premier à comprendre la gravité de la situation, mais il se retint d’en parler à ma mère, ça l’aurait trop inquiétée. Il m’aida à regagner ma chambre et alors que je pensais qu’il allait me laisser seul à ma peine, il s’installa à mes côtés sur mon lit et me demande de lui raconter ce qui me pesait. Je ne voulais rien dire, je ne voulais pas qu’il pense qu’elle était mauvaise, j’étais seul responsable de cette situation, moi et ces foutus yeux. Mais je finis tout de même par craquer, c’était trop dur à supporter pour moi, je n’étais plus aussi fort que quand elle était là.
Il resta silencieux à m’écouter, et sans dire un mot il me serra dans ses bras, geste qu’il n’avait plus fait depuis ma sortie de l’hôpital il y a des années. Je restais dans les bras de mon père, pleurant silencieusement parce qu’un homme n’est pas sensé pleuré, mais moi je suis qu’un gamin alors ça compte pas. Epuisé, je lui demandais de me laisser, j’avais envie et besoin d’être seul, je ne voulais voir personne et même si je l’avais voulu, c’était impossible.

Mes yeux… Ce que je pouvais les haïr depuis ce jour… Ils étaient là mais ne servait à rien. Si mes orbites avaient étés vides, ça aurait été plus logique. Mais il ne tenait qu’à moi de réparer cette erreur, je ne verrais de toute façon plus jamais le soleil se lever et la lune briller, alors autant en finir avec cette tare non ? A tâtons, je me dirigeais vers mon bureau, trébuchant au passage sur une de mes valises, j’avais refusé que ma mère entre pour les ranger. En fouillant mon bureau, ma main s’égratigna sur ma paire de ciseaux, c’était ça que je cherchais. Je comptais arracher ces deux inutiles de mon visage, je n’avais pas peur et j’avais tellement mal au cœur, que je doutais de ressentir une quelconque douleur ailleurs. Je défis mon bandeau que je laissais tomber, attrapais la paire de ciseaux et la dirigeais vers mon œil droit. A l’aide de ma main gauche, je maintins, mon œil ouvert et avec la droite, je glissais la lame de ciseaux sous le globe oculaire. J’aurais pu simplement planter la lame dedans, mais c’était mieux de se débarrasser d’eux entièrement, qu’il n’en reste rien sinon un creux vide, comme dans mon cœur. Je commençais à bouger la lame, mais bien vite je m’arrêtais, la douleur était insoutenable, j’avais envie de tout arrêter, mais il fallait que je le fasse, je ne pouvais pas fuir, alors je me remis à bouger. Je sentais du liquide couler sur mes joues, était-ce des larmes dues à la douleur, du sang à la blessure, un mélange des deux ? J’en savais rien, mais je sentais que le flux ne s’arrêtait pas, je sentais le liquide couler lentement jusque dans mon cou. J’entendis juste un cri dans mon dos et des bras m’encercler tandis que d’autres m’arrachaient ma paire de ciseaux des mains et la retirait précautionneusement de mon œil. J’entendais ma mère pleurer dans mon dos, me serrant contre elle à m’en étouffer. Elle s’excusait de ne pas avoir vu que j’allais si mal, elle s’excusait d’être une mauvaise mère. Je voulais la rassurer, lui dire qu’elle n’y était pour rien, mais les mots refusaient de sortir.
Mon père revint et me pris dans ses bras pour me porter jusqu’à la voiture, je voulais protester, lui dire que je pouvais marcher, mais mon corps était devenu comme une poupée de chiffon, plus aucun mot ne voulait franchir la porte de mes lèvres, mon corps lui-même ne voulait plus m’écouter. Mon père nous conduisit à l’hôpital, et je fus reçu relativement vite compte tenu de mon passif et surtout de ma notoriété, même après tout ce temps, je n’avais pas été oublié dans mon pays. Après quelques examens, le médecin annonça que je n’avais rien de vraiment grave, mais que j’avais tout de même endommagé mon œil, ce qui pourrait me gêné le jour où je retrouverai la vue. Sans vraiment comprendre pourquoi, je me mis à rire. Un rire sans joie, un rire nerveux. Non seulement je m’étais loupé, mais en plus cet abrutit faisait de l’humour. On savait tous que jamais je ne retrouverais la vue, à quoi ça servait d’entretenir une chimère auprès d’un gamin qui ne croyait plus en rien ? Ma bouche se décida enfin à répondre aux ordres que je lui donnais depuis tout à l’heure, et je pus dire ce que je pensais à ce foutu médecin qui au final ne servait à rien à part s’engraisser sur mon dos.
J’étais en colère, triste mais en colère, personne ne comprenait rien à rien, y avait qu’elle qui me faisait sourire…

Je quittais la pièce de rage, semant mes parents et le médecin au détour d’un couloir, mon agilité perdue m’était revenue, mais cette fois j’avais un but à accomplir. Cet hôpital, je le connaissais comme ma poche et, malgré les années, il n’avait pas changé d’un pouce. Bien vite, je me retrouvais dans la réserve médicale, là où se retrouvent les boites de compresses et autres matériaux médical. Je savais qu’ici, je trouverais de quoi arracher cette saloperie. N’y voyant rien, je parcourais les boites à l’aide de mes mains, ouvrant les paquets stériles à la recherche d’un objet coupant quand je trouvais enfin mon bonheur. En retirant une protection, mon doigt s’entailla sur la lame d’un scalpel jetable, quoi demander de mieux ? Ce truc pourrait entrer dans mon orbite comme dans du beurre. Et je recommençais comme à la maison, reprenant mon travail inachevé. J’avais mal, je souffrais même, mais cette fois personne ne m’en empêcherait, cette chose quitterait mon corps. Elle avait dit les aimer, m’avait-elle menti pour ne pas me faire de mal ? De toute façon sans elle, ils n’avaient plus de raison d’être. Dans un cri de douleur pure, j’arrachais enfin ce mal de moi. Mais mon cri avait alerté le personnel qui n’eut pas de mal à me retrouver. J’avais l’œil droit fermé, à l’odeur métallique, je savais que c’était du sang qui en coulait, et mon œil gauche pleurait. Il pleurait de douleur, de tristesse, de détresse, je ne reconnais plus, j’avais peur de moi-même. Ce même jour, on m’interna et je passais en salle d’opération, mon œil était perdu il fallait réparer les dégâts que j’avais causé dans mon accès de folie. Il leur fallu un long moment et beaucoup de séances avec un psy pour en conclure que mon état mental était à nouveau stable, et pour me laisser sortir. Pour la première fois depuis mon internement, je mettais un pied dehors. Je sentais les rayons du soleil sur ma peau, l’odeur des cerisiers en fleur. J’aurais aimé la faire venir ici avec moi pour voir ce spectacle, mais elle et moi c’était définitivement mort, elle n’avait jamais essayé de me retrouver, je serais mort que ça lui serait certainement égale…

Alors que tous regardaient les cerisiers et s’extasiaient joyeusement, moi je pleurais silencieusement la perte de la seule femme que j’aie un jour aimée. J’aurais tellement voulu lui demander…

- Nan’de… ?

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